Le Père Albert BAKONOU

Écrit par Guinaga Joseph le .

Le Père Albert Bakonou nous écrit depuis l'Italie:

Une année, en Italie, dans une paroisse, c’est peu pour acquérir une bonne expérience pastorale, surtout que j’étais arrivé sans connaissance de langue (l’Italien), outil incontournable pour la pastorale et le rapprochement des individus. Cependant, il y a des réalités qui se font connaître et comprendre sans qu’on ait besoin d’un long délai. Voici quelques aspects de la vie de la communauté paroissiale Immacolata où, je suis depuis le mois de septembre 2010.

Un de nos professeurs au Grand Séminaire avait l’habitude de nous dire : « prenez toujours les choses (la vie) du bon côté ». Je me sers toujours de ce principe pour affronter ou analyser les situations auxquelles la vie m’amène à faire face. Souvent, on reproche à l’Occident, entre autres, son individualisme accentué qui se vérifie facilement dans les choses ordinaires. Pourtant, ni tout est mauvais, ni tout est parfait. Ceci est valable et pour l’Europe et pour l’Afrique. Il y a des choses que je remarque et qui m’émerveillent. Je parle par exemple des personnes qui à la fin d’une célébration, sachant que je suis Africain, m’approchent pour faire ma connaissance et partager avec moi leur expérience en faveur des émigrés, des orphelins ou des personnes âgées et seules, en Europe et en Afrique.

La « Parracchia dell’Immacolata e san Martino a Montughi » est le nom officiel de ma paroisse et compte environ 11.000 fidèles. Nous sommes deux prêtres. Le curé est nouveau, arrivé en septembre dernier, est professeur de religion au Lycée et de philosophie à la Faculté de théologie où j’étudie. La vie liturgique et spirituelle de notre paroisse est rythmée par les célébrations eucharistiques, deux fois (matin et soir), les jours ordinaires. Les dimanches et les jours de fêtes, nous avons quatre célébrations eucharistiques : trois fois le matin et une fois le soir. Il y a une bonne participation des fidèles aux célébrations. Il y a toujours un calme de recueillement et de prière. Les différentes activités (pastorales ou apostoliques, catéchèse, Caritas…) s’organisent bien.

Je me sens bien accueilli et accepté par les fidèles et cela a facilité mon intégration. Maintenant, je me sens « a casa mia ». En plus des études qui m’occupent durant toute la première partie de la semaine (lundi-mercredi, matin et soir), ma pastorale se réduit essentiellement à l’apostolat des sacrements, « la pastorale sacramentaire ». Il y a naturellement, la messe tous les jours et deux fois tous les dimanches, les confessions, administrer les sacrements des malades aux personnes âgées ou malades. Cela me donne la force : le contact tous les jours avec le Christ, qui est le centre de ma vie de prêtre ou bien simplement de chrétien ; la joie de porter le Christ aux personnes qui ne peuvent plus venir à sa rencontre dans son Église ou la joie de le rencontrer en eux. (…)

Ce qui m’impressionne c’est surtout les retrouvailles qu’on a plusieurs fois organisées à diverses occasions (fêtes chrétiennes, adieux etc.). Je souligne deux aspects : la dissolution momentanée du « fameux individualisme occidental » (ou la solidarité, la fraternité partagée) d’une part et la prise en charge d’autre part. La célébration liturgique à l’occasion de ces retrouvailles voit toujours une large participation. Et la restauration, le « partage fraternel » qui suit, comme on le dit à Pala, est entièrement pris en charge par les fidèles, les paroissiens. Les dépenses ne sont pas à la charge de la caisse paroissiale. On boit et on mange copieusement, avec souvent les « douze corbeilles pleines », mais ce sont les fidèles qui se proposent d’apporter l’un du vin ou l’entrée, l’autre le champagne ou le second, l’autre encore les assiettes ou les verres, ainsi de suite et on a tout ce dont a besoin pour fêter. On ne fixe rien et n’impose rien, on propose et attend des bonnes volontés qui arrivent toujours. De même, les quêtes spéciales pour les travaux de restauration de l’église se font assez souvent. On distribue des enveloppes au début de la messe et les fidèles les rendent pendant les quêtes donnant ce qu’ils veulent donner. (Cependant, j’ai été surpris un jour quand on m’a montré les quêtes ordinaires où j’ai vu des centimes... Ce jour, je me suis repenti d’avoir quelques fois, à Pala, grondé à cause des pièces de 10 f. C’est une digression entre parenthèses). Les parenthèses fermées, je voudrais simplement dire que, ce fait, à mon avis, exprime bien la prise en charge à laquelle notre Église cherche à arriver, ce que j’appelle : « la libre et responsable prise en charge matérielle et financière de l’Église ».

Par ailleurs, pour le « partage fraternel », il n’y a pas de liste d’invités : personne n’est invité et tous sont invités, même ceux qui n’ont pas participé à la célébration eucharistique. Ainsi donc, pas d’exclus du partage fraternel auquel sont presque souvent présentes les mêmes personnes. C’est à des pareilles occasions que souvent je fais de nouvelles rencontres et connaissances, car le plus souvent, à la fin de la messe dominicale, presque tous s’en vont en hâte, et l’église ne tarde pas à retrouver son calme ordinaire. Là on sent la chaleur fraternelle, la convivialité et la générosité d’être utile aux autres. Là, on se sent en famille, on se sent Église.

Plusieurs fois aussi, nous avons eu des rencontres avec les ministres extraordinaires de la communion - (qui font aussi les servants de messes parce que les enfants de chœur, nous n’en avons pas encore, mais les vieux et vieilles du chœur, qui sont fiers de l’être et rendent bien service) - au cours desquelles nous mangeons « la pizza ». Cependant, chacun paye ce qu’il a mangé. En outre, les personnes âgées, en retraite s’occupent volontiers de la propreté de l’église et des autres locaux de la paroisse. Certes, entre Europe et Afrique, les réalités économiques ne sont pas les mêmes, mais le problème n’est pas qu’économique. Il y a un travail à faire pour motiver et faire intéresser les fidèles à la prise en charge. Même en Europe il y en a besoin, car dit-on, « vouloir c’est pouvoir », quand on veut, on peut.

P.Albert Bakonou